Au début de tout il y a la Corse, où Napoléon Bonaparte naît le 15 août 1769. Son père, après avoir combattu aux côtés de Paoli pour l'indépendance de l'Ile, se rallie à la France et obtient pour deux de ses fils des bourses dans les écoles du roi. L'écolier Bonaparte se distingue plus particulièrement dans les mathématiques, ce qui lui vaut d'être reçu à l'École royale militaire de Paris en 1784. Avec la Révolution, Bonaparte va pouvoir donner sa mesure. Mais ce sera d'abord l'échec, et dans sa propre patrie. Jusqu'en 1793, il se sent plus Corse que Français et il essaie d'être de se faire une place dans l'élite. Il fréquente l'avocat Joseph qui le pousse dans la vie politique. A force d'intrigues, Joseph devient conseiller général de la Corse et Napoléon obtient le poste de lieutenant-colonel de la garde nationale d'Ajaccio. Mais Bonaparte doit fuir après que Paoli eut été dénoncé devant les Jacobins de Toulon par Joseph Bonaparte. La Convention ordonne de l'arrêter. La famille Bonaparte est pourchassée et se réfugie dans le maquis. En juin 1793, elle passe sur le continent.
A Marseille où elle s'est réfugiée, la famille Bonaparte vit dans la misère. Durant l'été 1793, la France est menacée. L'Europe cherche à anéantir la jeune république jacobine. Bonaparte se rallie à la république montagnarde et publie un opuscule: le Souper de Beaucaire. Méfiant à l'égard des masses populaires Bonaparte veut, comme beaucoup d'autres Français, contenir, canaliser, utiliser leur action. Bonaparte se distingue dans sa mission de déloger les Anglais de Toulon où il obtient du Comité de salut public le grade de général de brigade. Après le 9-Thermidor, ses amitiés montagnardes lui valent la prison. mais un regain de fortune, dû à l'amitié de Barras, permet à Bonaparte de devenir commandant en second de l'armée de l'intérieur. Le 13-Vendémiaire, il a pour mission de réduire les insurgés royalistes retranchés dans l'église Saint-Roch.
Par l'entremise de Barras, le jeune général rencontre Joséphine, veuve du général vicomte de Beauharnais. Elle a trente-trois ans, Bonaparte vingt-sept. Marié le 9 mars 1796, Bonaparte est nommé commandant en chef de l'armée d'Italie. Accueilli avec suspicion par ses subordonnés, il va très vite s'imposer à eux, parfaire sa pratique militaire et connaître l'exercice de l'autorité politique.
Victorieux en Italie, Bonaparte est un homme encombrant pour le Directoire. Pour obliger Londres à négocier, le Directoire prévoit de couper la route des Indes, lieu de son principal commerce. Une expédition contre l'Egypte est mise sur pied. Bonaparte accepte d'autant plus volontiers cette mission prestigieuse que son avenir semble bouché en France. Militairement, l'expédition tourne court. Politiquement en revanche, elle permet à Bonaparte de consolider son rôle de «sabre» de la République.
Autour de Sieyès, des intrigues se nouent. Le but est de prendre en main le gouvernement et d'instaurer un gouvernement stable qui garantira à la bourgeoisie les acquis de 1789. Le 18 brumaire (9 novembre) 1799, on fait croire au Conseil des Anciens qu'une menace pèse sur lui. Pour sa sécurité, il doit s'installer à Saint-Cloud. Nommé commandant des troupes de Paris, Bonaparte escortera le Conseil. Mais le général veut brusquer l'Histoire. Il entre à la tête de ses soldats dans la salle du Conseil.
Chef de bande, Bonaparte est mu par une volonté dominatrice et une ambition sans borne. Son goût du pouvoir est servi par une qualité remarquable: il sait écouter et il veut s'informer avant de prendre une décision. Il comprend très vite quelle est sa marge de manoeuvre.
Par le coup d'Etat du 18 Brumaire, Bonaparte rétablit le régime du Consulat. Premier consul puis consul à vie, il rassure la bourgeoisie et stabilise les conquêtes de la Révolution. Sa politique intérieure consiste à opérer une réconciliation nationale, notamment par la signature du concordat avec le pape. En fait, c'est une mise sous tutelle de l'Eglise de France que Bonaparte réussit à mettre en place.
Le complot royaliste de Cadoudal, en 1804, fournit à Bonaparte un prétexte pour faire exécuter le duc d'Enghein et répondre aux aspirations à un pouvoir fort. Le Sénat l'ayant proclamé «empereur des Français» le 18 mai 1804, Bonaparte est sacré le 2 décembre par le pape Pie VII venu à Paris. Il prend le nom de Napoléon Ier.
Par le traité de Lunéville, en 1801, Bonaparte contraint l'Autriche à la paix. Avec la Grande-Bretagne, il conclut la paix d'Amiens qui met fin à dix ans de guerre en Europe. Une paix provisoire, car le nouvel empereur aime la guerre et il en a besoin. Mais avant de poursuivre sa politique de conquête, il impose sa médiation aux cantons suisses.
Fasciné par la noblesse, Napoléon crée sa noblesse d'empire et installe les membres de sa famille sur les trônes des pays qu'il a soumis. Poursuivant sa politique de conquête, il entre en guerre avec les puissances européennes, la plus acharnée étant la Grande-Bretagne qu'il cherche à isoler.
S'il confisque les libertés politiques, Napoléon conserve de 1789 le legs fondamental: la transformation sociale. Or, cette nouvelle société qu'il consolide s'appuie sur des principes qui sont subversifs de l'ensemble de l'ordre européen. Avec cette Europe des aristocrates, il ne peut y avoir de compromis.
C'est la rupture avec la Grande-Bretagne. Napoléon envisage un débarquement et prépare sa grande armée qu'il équipe de 1700 bateaux à fonds plat. Mais le projet est trop ambitieux et l'empereur doit renoncer. Sur le continent, en revanche, la guerre appelle la guerre!
La guerre comme système, jusqu'à la débâcle. Pour Henri Guillemin, «la France» a été la proie de Napoléon. Et l'historien de dresser le lourd tribut payé à ses guerres de conquêtes en Europe.
Dernier coup de poker de l'empereur, son retour de l'Ile d'Elbe. Mais l'Europe coalisée se montre unie face aux risques d'un retour du régime bonapartiste. Et la France elle-même se glisse dans les habits de la Restauration à venir.
Avec ce sens de la formule, Henri Guillemin tire dans cette dernière émission des Dossiers de l'Histoire consacrés à Napoléon le bilan de l'épopée du Corse en Europe. Un état des lieux critiques de ce qui fut une période essentielle dans l'histoire de l'Europe.