C'est à Barbès que tout commence, en 1948 : au numéro 2 du boulevard Rochechouart, en face du métro aérien. Jules Ouaki, un Juif tunisien venu d'un autre quartier populaire, la Goulette de Tunis, y ouvre ce qui va devenir le temple du textile bon marché. Dans une ambiance de souk, sur 50 mètres carrés, vêtements déstockés, culottes, collants à 1 franc, linge de maison, casseroles... le tout à prix cassés. Juste ce dont a besoin la population dans l'immédiate après-guerre. Avec ses bacs à fouille, son slogan "Tati, les plus bas prix" et son logo vichy rose et blanc aux couleurs chères à Brigitte Bardot, le magasin de Barbès révolutionne le commerce et devient vite l'emblème du quartier. Et plus encore : un parfait symbole de la France des Trente Glorieuses, une institution. Jusqu'à 35 millions de visiteurs par an (dans les années 80)… plus qu'un monument parisien ! Tati figure même dans les guides touristiques japonais. Age d'or "Tati est l'enseigne pionnière de la vente de produits discount en France !" clame aujourd'hui le site de la marque. Mais son fondateur n'allait pas se contenter d'être un pionnier. Son ambition : devenir les Galeries Lafayette du pauvre. Le Tati de Barbès s'agrandit, colonise les immeubles voisins (surtout des hôtels de passe). Dans les années 1970, c'est une grande surface de 3 000 mètres carrés où se pressent chaque jour... 40 000 clients ! Puis deux autres Tati parisiens attirent les foules, l'un place de la République, l'autre rue de Rennes – c'est devant ses vitrines que, le 17 septembre 1986, un attentat à la bombe fera 7 morts et 55 blessés. L'enseigne conquiert la province (dix magasins, à Lille, Lyon, Marseille...) et l'outre-mer (cinq magasins). A l'époque, un fabricant de textile français sur quatre travaille pour Tati, qui emploie des milliers de salariés. C'est l'âge d'or de la marque. Tati orphelin Atteint d'un cancer, Jules Ouaki meurt en 1982, mais Tati reste en fam